Affaires familiales, l’Allemagne réforme sa procédure: après les résultats probants de la pratique de Cochem qui a évoluée durant plus de 10 ans, la République fédérale allemande a légiféré en vue de son application dans tout le pays. Cette loi pose le cadre et fixe les modalités dans le but de favoriser la diligence et l’incitation à un accord (CROP, 2 octobre 2009).
Pratique de Cochem: comment ça fonctionne ? Exemple complet d’une médiation ordonnée. La pratique de Cochem est un exemple réussi d’application fructueuse du principe de médiation ordonnée. Les chiffres sont éloquents: dans 95% des cas, les intervenants des diverses professions purent résoudre les problèmes. Dans les 5% restants, les parents furent adressés à un service de conseils de vie et 98% de ceux-ci furent aidés avec succès. (CROP, janvier 2009)
La médiation – coopération ordonnée: Une nécessité. La réorganisation des relations enfants-parents dans les situations de séparation-divorce nécessite le développement de la capacité des parents de négocier autour des intérêts de l’enfant. Les procédures judicaires actuelles empêchent souvent les parents à rechercher eux-mêmes des solutions aux conflits concernant leurs enfants. Les lourdeurs du système judicaire contribuent même à aggraver les conflits, la souffrance des enfants, les coûts aux familles et à la société. La médiation-coopération ordonnée permettrait aux parents de développer une coresponsabilité parentale plus saine pour le développement de l’enfant ainsi qu’une réduction des frais de procédures judiciaires … (Patrick Robinson, 7 décembre 2007)
Le consensus parental est un mode de résolution et d’évitement des conflits familiaux qui a fait ses preuves dans de nombreux pays (dont certaines régions de Suisse, voir ci-dessous) et que nous souhaitons donc voir étendu sur tout le territoire national.
« L’objectif est de limiter l’impact d’un divorce sur les enfants. Car aujourd’hui, les experts estiment que dans 15% à 20% des cas, les séparations mettent gravement en péril la santé des enfants. L’an dernier, 17’000 divorces ont été prononcés en Suisse. »
Le consensus parental est inspiré de la méthode Cochem (également nommée pratique de Cochem) qui est une forme de médiation ordonnée. La méthode Cochem est née en 1992 dans la ville de Cochem en Allemagne.
Le consensus parental pousse les parents à s’entendre dès le début du processus de séparation. Tous les acteurs de la séparation (parents, avocats, APEA, juges, médiateurs, psychologues …) travaillent ensemble dans le but de trouver un accord qui évite à l’enfant de souffrir. Agir rapidement en amont change la donne car les institutions font souvent apparaître le conflit ou l’enveniment en laissant pourrir une situation conflictuelle par des mois et des années de procédures qui entraine frais et souffrances.
« Avocats, ayez la sensibilité de remettre l’enfant au centre des préoccupations. Vous pouvez faire de la bonne prévention en amont. »
(Dre Alessandra Duc Marwood, psychiatre, médecin adjoint au centre de consultation Les Boréales, unité du CHUV)
Les expériences faites dans plusieurs pays (Allemagne, Autriche, USA, Canada, Grande Bretagne, Pays-Bas, Norvège), démontrent que la médiation-cooperation ordonnée permet aux parents en conflits de réduire leurs conflits et de développer leurs capacités de coopération et de coresponsabilité parentales avec des effets positifs sur leurs enfants. Ce modèle de coopération ordonnée développé depuis une vingtaine d’année avec succès à Cochem en Allemagne démontre que les parties concernées (parents et enfants) doivent pouvoir se faire aider par des intervenants spécialement formés à ce type de médiation. Un élément qui a fortement influencé le succès de cette approche est que la coopération soit ordonnée et le processus entamé très rapidement (dans les 15 jours) suite à une décision de séparation. Les autorités y voient un avantage pour réduire la possibilité d’enlisement ou d’aggravation des conflits.
«Tout ce qui encourage le dialogue doit être proposé, voire imposé. Je préconise un changement de notre pratique, une prise de conscience que le bien-être de l’enfant fait partie de l’intérêt de notre client»
(Irène Wettstein, avocate veveysanne)
Sont mises en place des sessions d’information, de sensibilisation à la séparation, un accompagnement à la coparentalité, une médiation (les cinq premières séances étant financées par le canton) et dans de rares cas une thérapie ordonnées par le juge si nécessaire. Les enfants de plus de 6 ans sont invités à un entretien personnel avant l’audition de leurs parents, symbolisant la priorité mise sur l’enfant. Des psychologues et des médiateurs accompagnent les parents dès le début du processus.
Une clef importante du grand succès de la pratique de Cochem, aujourd’hui déployée dans toute l’Allemagne, réside justement dans le fait que le Juge aux affaires familiales envoie en médiation (conseil de vie) des parents en conflit même contre le gré d’un des parents. Pour le parent le plus récalcitrant, il se voit envoyé en thérapie et son éventuel refus de collaborer est considéré comme un manque de capacité parentale voire une éventuelle maltraitance envers les enfants pouvant entraîner un refus de garde.
Intégration du modèle de consensus (Cochem) en Belgique Marie-France Carlier, juge du Tribunal de la famille de Dinant, Belgique (Luxembourg 2016)
Elle a été mise en place en 2016 dans le canton de Bâle-Ville où les parents en désaccord sont depuis envoyés en consultation, 75% d’entre eux trouvent des solutions à l’amiable. Elle a été également mise en place à St Gall (depuis au moins mars 2012).
« Le nombre d’accord est très élevé et la durée de la procédure a diminué, de même que la nécessité d’enquêtes sociales ou d’expertises psychojudiciaires. »
« Le dialogue est encadré par une tierce personne neutre qui n’est pas là pour trancher le conflit, mais pour accompagner les parents dans la recherche de solutions respectant leurs besoins et ceux de l’enfant. »
(Laure Clivaz-Strehmel, présidente de l’association valaisanne de médiation)
Entretien débat de Me Sydney Kamerzin, du MCPVs et de la CROP (49 minutes)
En savoir plus
Projet: améliorer les procédures de divorce pour les enfants (Fr-app, 27 janvier 2025)
Valais : la méthode Cochem a fait ses preuves lors des processus de séparation et est étendue à trois nouveaux districts. Après 2 ans de projet pilote, la méthode, incluant séances de sensibilisation, information et processus de médiation précoce imposée par les juges et autres acteurs est un succès encourageant. « Le nombre d’accords trouvés est très élevé et la durée de la procédure a diminué, de même que la nécessité d’enquêtes sociales ou d’expertises psycho-judiciaires. » se réjouit une juge cantonale. (Le Nouvelliste, 18 février 2022)
Projet pilote vaudois : une démarche indispensable pour protéger les enfants. La canton de Vaud, avec l’Ordre judiciaire vaudois, va lancer un projet pilote sur la base de la méthode Cochem, qui pousse les parents à s’entendre dès le début du processus de séparation. Après l’expérience positive dans le district de Monthey (VS), une nouvelle initiative romande pour sortir des processus néfastes à l’intérêt de l’enfant. (24 Heures, 13 janvier 2022)
Limiter les conflits parentaux : proposition d’une commission de conciliation au Conseil national. L’association Avenir Familles veut simplifier les procédures de divorce avec des commissions de conciliation. Objectif : trouver un consensus dès le début des procédures, pour le bien des enfants. Un projet pilote sur le modèle du consensus parental est en cours dans le district de Monthey (VS). (Le Courrier, 17 novembre 2021)
Le modèle de consensus parental en pratique (Camille Rey-Mermet, juge au tribunal cantonal de l’État du Valais – Clara Wack, doctorante en droit à l’Université de Fribourg et avocate au barreau de Genève, septembre 2021)
Les Echos de Vacarme – Guerre des ex: quand lʹenfant devient une arme (RTS, 21 avril 2021)
Divorce conflictuel : agir vite et ordonner des médiations précoces. Des collectifs de professionnels de la santé psychique alertent sur les dégâts causés aux enfants et adolescents par ces processus interminables. Ces conflits doivent être traités au plus vite en évitant l’enlisement judiciaire. Des méthodes existent et sont appliquées en Valais. Les autorités politiques sont exhortées à agir pour l’introduire aussi dans le canton de Vaud. (24 Heures, 22 janvier 2021; 24 Heures, 15 mai 2020; 24 Heures, 16 décembre 2019)
Video sur la Philosophie du modèle de Cochem par Bee Marique, avocate et médiatrice, partenaire de la mise en oeuvre du projet Cochem à Dinant en Belgique (Luxembourg, 2016)
Séminaire du 21 avril 2010 sur la médiation familiale à La Chaux-de-Fonds. Thème principal: les pratiques de la médiation au Québec, en France et en Allemagne. L’intitulé du séminaire donne à penser que le thème du séminaire était consacré à l’application de la médiation dans les affaires familiales et que c’est la médiation dans son acception classique qui est sous-entendue. Or, tant la genèse du séminaire que le contenu des divers exposés ont clairement montré que c’étaient les autres formes de la médiation, imposée, préalable, institutionnelle, etc. qui étaient au centre des préoccupations des organisateurs, l’Association neuchâteloise de médiation familiale et le Centre de recherche sur le modes amiables et juridictionnels de gestion des conflits de l’Université de Neuchâtel. (30 mai 2010)
Médiation ordonnée applicable dans le contexte du droit à la relation personnelle. Les autorités tutélaires et les tribunaux ont le droit d’ordonner à des parents de se soumettre à une médiation. Dans son arrêt, le Tribunal fédéral fait le constat que, conformément à l’art. 307 al. 3 CC, il est admissible d’ordonner une médiation imposée dans le contexte de la réglementation du droit à la relation personnelle (droit de visite). L’arrêt du 9 décembre 2009 reconnaît pour la première fois que l’obstruction aux relations personnelles entre le parent non gardien et ses enfants est de nature à induire l’aliénation des enfants à l’égard du parent non gardien. Il faut relever que le Tribunal fédéral justifie le recours à la médiation ordonnée par la nécessité de donner la priorité aux besoins de l’enfant et, en particulier, à son besoin d’entretenir des relations avec ses deux parents. (Arrêt 5A.457/2009, résumé en français, 9 décembre 2009)
Allocution de M. Hans Lehmann au 7ième colloque de Médecine de premier Recours (Palais de Beaulieu, Lausanne) (1er septembre 2005). Le médecin se sent parfois confronté à des patients ayant des problèmes psychosomatiques dont il attribue l’origine à des conflits de couples persistants tendant à la séparation. La médiation familiale peut-elle intervenir face à de telles situations ? Introduction du Dr. Siméon Grossmann:
« Aujourd’hui encore le divorce d’une famille est une grande crise pour les concernés, souvent aussi pour les enfants. Il s’agit d’essayer de diminuer ou même d’éviter les dommages psychiques et physiques à long terme des personnes qui subissent un tel drame.
En cabinet médical, ces problèmes ne sont pas rares et les patients montrent souvent des troubles psychosomatiques ou psychiques, parfois somatiques (après des altérations physiques). Ces troubles peuvent et doivent être traités avec des entretiens et des médicaments, mais pour vraiment résoudre les problèmes de base, il faut trouver d’autres solutions.
Maintenant encore les patients cherchent de l’aide auprès d’un avocat, qui, par définition, défend les intérêts d’une personne, son client, mais pas de toute la famille. Cette habitude mène souvent à une solution de vainqueur et vaincu, une situation défavorable à long terme pour aller vers un dénouement plus équitable. En plus, la loi déchoit l’un des parents de son autorité parentale, dans 9 cas sur 10 le père. Le couperet de la justice tranche, le lien entre les enfants et le vaincu.
Moi, comme confrère, j’ai vécu personnellement ce type de procès. C’est alors que j’ai commencé à m’engager pour chercher de meilleures solutions auprès d’une association Suisse alémanique : VEV ( Verantwortungsvoll Erzehiende Väter un Mütter) ayant 2 buts : médiation et responsabilité commune. Ensuite comme président de l’association « Parents forever Switzerland ». Même si je suis moins actifs, je me solidarise toujours entièrement avec la philosophie de ces associations … »
Le modèle de la Moselle – La pratique de Cochem aplanit les disputes autour de l’enfant. Le conflit entre personnes divorcées subit une escalade au moment où la justice est saisie par un des époux. En plus, la dispute dure souvent longtemps. C’est pourquoi le juge Jürgen du tribunal de Cochem accorde l’urgence aux conflits dans lesquels des enfants sont concernés. Une audience est convoquée dans un délai de deux à trois semaines. Partout ailleurs, il faut attendre au minimum une demi-année. (Bernd Fritz, Frankfurter Allgemeine Zeitung, 23 décembre 2004, N° 300 / Page 101, 24 décembre 2004)
Le succès de la coopération ordonnée du « Modèle de Cochem » – Coopération ordonnée dans le conflit familial comme processus d’ajustement : Réflexions théoriques et transposition pratique: « D’un point de vue psychosocial – se basant sur l’approche par la théorie classique des dissonances à l’ajustement de conflits – des réflexions sont émises pour déterminer dans quelle mesure une coopération ordonnée dans le conflit familial peut y amener un ajustement et ainsi provoquer une désescalade de ce conflit. Ces réflexions portent sur toutes les parties prenantes au conflit : d’une part au niveau des personnes concernées, mais également au niveau des professionnels. Afin d’appréhender un Modèle, l’on a en outre examiné dans quelle mesure l’intervention professionnelle dans le conflit familial représente une fonction de modèle pour les parties concernées. Enfin, un modèle pratique de réussite – dénommé « Modèle de Cochem » – est proposé car il fonctionne avec succès depuis des années grâce à la coopération ordonnée. » (Professeur Dr Traudl Fuechsle-Voigt, Coblence, Juin 2007)
Le rôle du tribunal. « La coopération interdisciplinaire est nécessaire dans presque tous les secteurs de la vie. Cependant, elle n’est que rarement pratiquée. Son application est souvent mise en échec par des conditions défavorables : les modifications nécessaires des pratiques échouent car elles sont souvent laissées à des « théoriciens » et manquent d’imagination. Afin de permettre une bonne collaboration entre les professionnels et les institutions, une condition est indispensable : la parfaite coopération entre les différentes unités. » (Jürgen Rudolph, Juge aux affaires familiales au tribunal de Cochem, janvier 2008)
Le rôle de l’office de la jeunesse. « La base légale pour le travail des Offices de Jeunesse s’est fondamentalement modifiée avec l’introduction en 1991 de la Loi sur l’Enfance et la Jeunesse (en Allemagne, la loi KJHG). Avec l’entrée en vigueur de la KJHG, les parents obtiennent le droit à une consultation auprès de l’Office de Jeunesse en cas de séparation ou de divorce (§ § 17,18 Sozialgesetzbuch VIII). Avant tout, cela signifie que les collaboratrices et collaborateurs sont confrontés à des tâches fondamentalement nouvelles ! » (Manfred Lengowski, Service de l’Enfance de Cochem, janvier 2008)
République fédérale allemande. Loi portant réforme de la procédure dans les affaires familiales et dans les affaires non contentieuses. Extraits de la législation allemande entrée en vigueur le 1er septembre 2009. Cette législation est largement inspirée de la pratique de Cochem. Elle a posé la base légale pour déployer cette pratique dans toute l’Allemagne.
Le Livret « Pratique Éthique de médiation familiale » est l’un des textes reprenant les fondements éthiques de la médiation familiale tels que pensés à l’APMF. C’est à ce titre un de nos textes fondateurs, avec le Code de Déontologie et nos statuts.
Protection de l’enfance. Lettre ouverte à tous ses acteurs (Isabelle Vuistiner-Zuber, avril 2019)
« Le divorce est un délicat exercice de transition vers un cadre de vie différent, en particulier quand des enfants sont présents. Sans s’en rendre compte, on peut se mettre à glisser vers quelque chose d’ingérable et source d’une souffrance intense.
Etre attentif à ses propres réactions suite à la rupture, donner aux enfants un surcroît d’attention au moment où l’on se trouve soi-même en déséquilibre, connaître les structures et les procédures qui peuvent nous soutenir ou savoir comment s’en défendre, cet ouvrage se veut d’abord un guide à l’attention des parents.
Les huit témoignages recueillis expriment avec force combien ces situations de tension peuvent nous marquer.
Dans ce vertige de séparations scabreuses, il convient de questionner la pratique des professionnels et des si mal- aimées APEA, afin d’obtenir le respect absolu du droit des enfants à être élevés par leurs deux parents.
Je veux croire en cette capacité d’autocritique et de remise en question de tous les acteurs de la protection de l’enfance. »
Isabelle Vuistiner-Zuber
Au nom de l’enfant … (Anne Reiser, Ed. Favre, Novembre 2012): Autorité parentale, nom de famille, pension alimentaire, chaque fois c’est au nom de l’enfant qu’hommes et femmes se livrent les luttes les plus acharnées lors d’une séparation. En justice, c’est également en son nom que ses parents s’opposent, surtout que sa naissance représente, pour celui qui cesse ou diminue son activité professionnelle, une perte d’autonomie financière. Le processus du démariage prévu par nos lois n’a-t-il pas un effet exactement contraire au but recherché, qui est de protéger la progéniture du couple désuni? Et en attendant les réformes espérées, l’avocate Anne Reiser livre aux couples des modèles de conventions qui leur permettront de clarifier et pérenniser leurs engagements, afin qu’ils puissent, le cas échéant, se séparer sans se déchirer.